Barcelone et moi

Barcelone et Karim Kemmat : « Un coup de foudre »

Barcelone, c'était d'abord un « ailleurs » pour Karim Kemmat dans les années 80, cette décennie post-moderne.

Une décennie qui respirait encore une certaine nonchalance mais annonçait également l’émergence d'une société plus clivante, du moins dans l'univers parisien du jeune homme épris de culture et de théâtre, portant peut-être une certaine culpabilité d'enfant d’immigré, tout en menant une vie d'étudiant tranquille dans le XVIIème arrondissement. « C'est vrai qu'à l'époque nous avions tous un peu l'envie de partir, de se libérer d'une certaine étiquette qui pouvait être liée à nos origines ou au quartier où nous avions vécu, bref d'une certaine manière se refaire une virginité en allant se fondre dans d'autres cultures ». C'est donc un peu par hasard que Karim Kemmat atterrit à Barcelone, en 1993, et aussi un peu à cause de Tirso de Molina. Car il décide alors de suivre une troupe de théâtre pour interpréter une œuvre du dramaturge espagnol au fameux Institut del Teatre de Barcelone : « La ville a véritablement été un coup de foudre ; nous avons joué ici pendant deux semaines, et j'ai été tellement marqué par cette expérience que je suis revenu deux ans plus tard pour faire des études universitaires de langue et culture espagnole hispanique ».

S'ensuivent des années de « petits boulots », de galère, de bohème, de musique, de coups de cœur, et d'amour... Une histoire qui dure depuis 22 ans. Une histoire qui dure. D'autant que Karim Kemmat vit avec sa femme et ses deux filles dans le quartier du Guinardo, à l'écart des flux de touristes déversés sur les ramblas par les bateaux de croisières. « Ce quartier du Guinardo, c'est vraiment ce qui me plaît le plus aujourd'hui à Barcelone, à la fois résidentiel et avec de bonne adresses pour décompresser ; c'est un quartier qui respire ». Et quand il manque d'air, Karim Kemmat monte jusqu'au Collserola, « un parc vraiment magnifique », avec un point de vue extraordinaire sur la ville, « son » parc.

Cette impression de se sentir chez soi, Karim Kemmat a su en plus la recrée pour ceux qui passent la porte de sa libraire, comme pour ceux qui viennent aussi assister aux concerts improvisés dans les bars du quartier (voire parfois à la Llibreria Bosch), lorsqu’il s’installe aux percussions : « La musique est importante dans ma vie, et c'est aussi ce mélange des genres que j'apprécie à Barcelone, où l'on n'est jamais enfermé dans un cliché ».